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Abstract

La crise de l'agriculture d’une part (remise en cause du modèle productiviste, réduction des revenus agricoles) et d’autre part les risques alimentaires survenus dernièrement poussent aussi bien les producteurs que les consommateurs vers des produits dits locaux, localisés ou de terroir. En Grèce, comme plus généralement dans les pays méditerranéens, le riche patrimoine agroalimentaire ainsi que l’attachement important au pays d’origine font que les consommateurs s’intéressent vivement aux produits traditionnels locaux. La demande croissante pour la protection de la provenance géographique des aliments (en Grèce il y a 63 étiquettes AOP et 23 IGP) et l'organisation de nombreuses fêtes de campagne et de festivals de produits locaux dans tout le pays -surtout en période estivale touristique- illustrent l'importance accordée par les collectivités locales à la valorisation du patrimoine rural, comme un moyen puissant de développement territorial. La question qui se pose est de savoir comment et dans quelle mesure les produits agro-alimentaires locaux dotés d’un signe de qualité d’origine géographique, peuvent en fait générer des synergies et des valeurs ajoutées territoriales. La question devient encore plus complexe dans le cas d’une production de légumes, comme c’est le cas de l’aubergine en question, si l’on tient compte qu’avec l’intensification excessive des cultures maraîchères dont la production est destinée aux circuits longs de commercialisation, celles-ci ont quasiment perdu leur ancrage sur des spécificités locales; qu’elles soient liées à une histoire, à un savoir-faire de production ou à des conditions géographiques et écologiques particulières (lien au lieu de production). D’autre part, des enquêtes ont montré que les consommateurs sont moins sensibles et habiles à reconnaître une identification de l’origine d’un légume lorsque selon leur conception ‘les légumes poussent tout seuls et de la même manière partout’ (Bressoud et Parès, 2010). Notre travail est basé sur les résultats d'une enquête de terrain, réalisée dans la municipalité de Léonidio (département montagnard d’Arcadie, Péloponnèse), focalisée sur un produit maraîcher spécifique, celui de l’Aubergine Tsakonique d’Appellation d’Origine Protégée de Léonidio (depuis 1996). Il s’agit d’une culture traditionnelle (semences issues de production locale, savoir-faire transmis au sein de la communauté locale) et emblématique de la région. L’aubergine Tsakonique est bien identifiable par les consommateurs grecs du fait de sa couleur violette et de sa forme spécifique longue. Cependant, l’invasion du marché grec par des aubergines « de type tsakonique » (issues des hybrides cultivés sous serre) fait que l’aubergine authentique de terroir Tsakonique perd du terrain par effet de concurrence déloyale. En outre, l’introduction des cultures maraîchères dynamiques et bien rémunératrices dans la région depuis les années 1990 (tomates, concombres et autres produits maraîchers sous serre) affecte la culture traditionnelle d’aubergine d’une concurrence même au sein de l’assolement local. Ceci dit l’aubergine Tsakonique devient de moins en moins intéressante économiquement pour les producteurs de Léonidio à partir du moment où ils n’arrivent pas à capitaliser la qualité spécifique du terroir et la bonne réputation de l’aubergine locale sur le marché national.

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